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Le parcours migrant en tant que mineur non accompagné ; un témoignage

Minaa Nawab, avril 2024


Lors de la Semaine des Droits des Enfants (SDE), organisée par Terre des Hommes Suisse UNIGE, nous avons eu la chance d'accueillir Ali Afzali, un jeune adulte de 19 ans qui est arrivé en Suisse à l’âge de 17 ans. Ali nous partage son histoire, puis une discussion a eu lieu sur le thème de la sécurité des enfants déplacés. Pendant la soirée nous accueillons trois autres intervenants : Mme Jeannine Boccali (représentante juridique à Caritas), Mr  David Naville (responsable de l’équipe protection à Terre des Hommes Suisse), et Mr Samuel Morard (assistant doctorant de sociologie au Centre interfacultaire en droits de l’enfant).


Actuellement, Ali a 19 ans et il est originaire d’Afghanistan. Il y a 2 ans, Ali décide de rejoindre son frère en Suisse. Lorsqu’il commence son voyage, il est un mineur non accompagné, il doit traverser 5 pays pour arriver en Suisse. Ali essaie à deux reprises d’entrer en Suisse. La première fois, il est arrêté à la frontière et refusé d'accès, alors qu’il explique qu’il souhaite déposer une demande d’asile. Il essaie à nouveau quelques temps plus tard et réussit à traverser la frontière le 6 mars 2022. Dès son arrivée, il se rend au foyer Boudry à Neuchâtel, le centre fédéral pour les migrants requérants d’asile. Il y reste 3 mois, lors desquels il a des interactions régulières avec son avocat qui le prépare pour son audience. Puis il est transféré au foyer de l’étoile où on lui attribue un assistant social, un éducateur, et il commence l’école ainsi que les cours de français. Dans le foyer, il décrit qu’il y a beaucoup de personnes au sein d’une chambre avec énormément de bruit, ce qui l'empêche de travailler pour l’école.


À peine quelques mois après avoir rejoint le foyer, Ali devient majeur et il perd l’assistant social qu’on lui avait attribué, car il est considéré comme étant adulte. Il décrit subir une difficulté très importante ne connaissant pas la ville ni la langue. Bien qu’il vienne rejoindre son frère, il ne peut pas rester avec lui, car il travaille et n’a pas beaucoup de temps pour l’accompagner. Il ne faut pas oublier que son frère est également un requérant d’asile, et il fait lui aussi son parcours. À ce moment-là, Ali essaie de s’accrocher aux connaissances afghanes rencontrées au foyer pour pallier son sentiment de solitude. Il y a une différence culturelle selon lui, qui rajoute des barrières à son intégration au sein de la Suisse. Pour améliorer son français, Ali a dû suivre de nombreux cours, et a surtout dû faire du travail indépendant. Il raconte qu’il regardait des films et YouTube en français pour accélérer son apprentissage.


Avant d’arriver en Suisse, Ali s’était imaginé aller à l’université. Arrivant sur place, il se rend compte des étapes qu’il devrait traverser, et les années que cela prendrait, ce qui change son attitude. Actuellement, Ali est en classe de COP (classe d’orientation professionnelle), qui sera suivie d’une année au CIP (classe d’insertion professionnel), suivi d’un CFC (certificat fédéral de capacité) ou un AFP (attestation fédérale de formation professionnelle) pour ensuite débuter un métier. Pour l’instant, il n’a pas décidé du métier à poursuivre, mais il est en recherche. 


Quand nous lui demandons s’il conseille la Suisse comme pays d'accueil, il nous répond qu’il ne sait pas encore. Il est arrivé il y a environ 2 ans seulement, et il ne connaît pas la suite de son parcours. Il nous parle du fait que la transition vers ses 18 ans a été brusque, du jour au lendemain, il était considéré comme majeur alors qu’il n’avait pas encore intégré le pays. Ses besoins n'avaient pas changé, mais l’offre était différente dès le moment où il a atteint l’âge de 18 ans. 


Ali décrit que même lorsqu’il est officiellement accepté comme requérant d’asile, il y a certaines instances où il est encore traité comme étant un “hors la loi”. Il nous raconte l’histoire d’une fois où il a été arrêté par la police et amené au poste de police. Et ce, malgré le fait qu’il avait fourni ses papiers d’identification, en l'occurrence son permis F.  


Mme Boccali nous explique par la suite les étapes pour un enfant non accompagné arrivant en Suisse. Lorsque les enfants arrivent, ils se rendent à Boudry, où ils ont une protection juridique gratuite et une personne de confiance, qui les aident pour la préparation aux auditions et aux procédures administratives. Le passage à Boudry peut durer jusqu'à 4 mois puis ils doivent être placés dans des foyers. Ce qu’elle critique dans le système Suisse c’est que les enfants doivent prouver qu’ils sont bien des enfants, donc avant d’être considérés comme des enfants, ils sont considérés comme étant des requérants d’asile. S’ils atteignent l’âge de 18 ans avant leur audience pour la demande d’asile, ils sont considérés comme des adultes dans la demande, ce qui n’est pas accompagné des mêmes privilèges. Elle souhaite voir plus d’organisations d'accueil de type volontaire afin de créer un réseau pour les personnes arrivant en Suisse.


Mr Naville nous parle des déplacements internes au sein des pays en conflits comme par exemple le Mali ou le Burkina Faso. Dans ces cas, Terre des Hommes Suisse, en collaboration avec les associations locales, essaie de tout mobiliser pour assurer les droits de l’enfant, dans le but de combler le vide dans les zones reculées que le gouvernement ne remplit pas. Il parle du fait que l’école peut jouer un rôle important dans l’intégration d’un enfant, par exemple un enseignant qui identifie les besoins particuliers de l’enfant et change les services dont il a besoin. L’enseignant pourrait aussi identifier les acteurs qui pourraient agir, et TDH Suisse essaie de les accompagner dans ce processus. Le déplacement des enfants est aussi un énorme enjeu émotionnel qui nécessite un suivi ainsi qu’un accompagnement psycho-social. Il est important de reconnaître qu’un enfant a le droit de s’exprimer par rapport à ses droits, de participer, et pas juste être un bénéficiaire de l’aide ; il n’est pas juste un objet ou un sujet de droit. 


Mr Morard nous parle d’un danger caché avec les mineurs non accompagnés. Il y a des cas de fugues et des disparitions sans doute, mais personne ne les déclare, laissant des enfants sans issue. Il pense qu’une des raisons à la disparition des enfants est lorsque l’audition a lieu quand l’enfant a 18 ans, et qu’il est jugé selon les droits humains, et non les droits de l’enfant.


Lorsqu’un État ratifie la Convention pour les Droits de l’Enfant, comme la Suisse l’a fait, elle s’engage notamment à respecter le droit international, qui comprend le droit de déposer une demande d’asile. Dans ce sens, il dit qu’accueillir des demandeurs d’asile “n’est pas une charité, mais un droit”. En termes de sociologie, il est aussi important que l’on considère les représentations que nous avons envers les enfants mineurs non accompagnés (MNA). L'étiquette MNA est surtout une étiquette administrative, et ignore la complexité de la demande selon Mr Morard. Il y a deux images que les personnes peuvent avoir ; l’image d’un jeune migrant, homme, rentrant dans le stéréotype “délinquant”, ou l’image d’un enfant qui est seul, qui n’a personne pour le soutenir.


Par ailleurs, à travers nos stands exposés dans le hall à l’Université de Genève pendant cette SDE, nous avons essayé de sensibiliser les étudiants de l’université au sujet des droits de l’enfant. Un de nos stands traitait le sujet du harcèlement à l’école. Notre équipe a choisi d’illustrer les potentielles insultes que les personnes pourraient entendre sur des miroirs, avec la possibilité au public de rajouter du texte, le but étant de se regarder en se mettant à la place d’une personne harcelée. Autour des miroirs, nous avons affiché des phrases de témoignages de personnes harcelées. Cela était complété par un mini quiz informatique sur le harcèlement et des contacts pour de l’aide en cas de harcèlement. Un autre de nos stands se basait directement sur la migration, avec des affiches informatives concernant le parcours des MNAs, illustré avec une barque gonflable pour représenter le voyage parfois périlleux qu’ils empruntent. Enfin, nous avions fait un stand en collaboration avec les Crayons Copains, une association qui récolte du matériel scolaire pour distribuer dans le monde entier. Nous avions un dépôt pour récolter le matériel et des dessins affichés des enfants qui ont pu bénéficier de l’aide des Crayons Copains.



Bibliographie 


‘L’apprentissage, et Après? - Orientation.Ch’. Accessed 21 April 2024. https://www.orientation.ch/dyn/show/8327.

Migration, State Secretariat for. ‘Addresses’. Accessed 21 April 2024. https://www.sem.admin.ch/sem/en/home/asyl/adressen.html.


Personnes interviewées : 

  • Ali Afzali, 

  • Mme Jeannine Boccali (représentante juridique à Caritas)

  • Mr David Naville (responsable de l’équipe protection à Terre des Hommes Suisse)

  • Mr Samuel Morard (assistant doctorant de sociologie au Centre interfacultaire en droits de l’enfant)


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